Shivers : le forum du chlex
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Shivers : le forum du chlex

D'abord unique forum français entièrement dédié au couple Chloé/Lex de Smallville, Shivers se tourne aujourd'hui vers l'écrit sous toutes ses formes !
 
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 A la limite du supportable (challenge 30 baisers)

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3 participants
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winnie
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winnie


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MessageSujet: A la limite du supportable (challenge 30 baisers)   A la limite du supportable (challenge 30 baisers) Icon_minitimeDim 26 Sep 2010 - 2:01

Ce Oneshot répond au challenge des 30 baisers sur le thème 27: "Débordement". C'est la suite directe du premier chapitre "Les derniers outrages"! Il vaut mieux avoir lu le début!

Dislamer: les évocations de Lex et Chloé ne m'appartiennent pas (j'ai changé les noms!) Attention au Smut!
Note: les mots suivis d'un * ont une définition en fin de fic!
Re-note: Merci Aranya, Six' et Chlo (youhouuu les latinistes!) pour les feeds du premier chapitre!!


~~~~


Via Appia*. Le soleil rasait les cyprès, la journée serait chaude. Aulus poussa un soupir. Il venait de passer quelques instants de recueillement devant la niche du columbarium* réservée à ses parents. Ils étaient morts depuis six ou sept mois, et il ne l’avait pas su. Avec le déplacement des troupes, les lettres des proches peinaient à arriver entre les mains du destinataire. Pourtant, les compagnons de son père qui formaient ensemble le collège* des menuisiers du Subure, s’étaient cotisés pour leur offrir une concession dans leur columbarium. Une plaque représentant le couple et leurs noms bouchait la niche.
_ On peut rentrer maintenant ?
Il acquiesça, un peu triste et dépité. Il n’avait pas vu ses parents depuis des années. La campagne des Gaules avait été longue. La blonde à ses côtés s’impatientait clairement. Azenor, son esclave, devrait peut-être attendre un peu plus sa liberté. Il faudrait qu’il donne une partie de sa solde au collège, c’était certain. Ils n’avaient pas encore eu le temps d’entrer dans l’appartement de l’insula. Dès son arrivée, les voisins s’étaient amassés pour lui parler, il avait aussitôt fait demi-tour pour prendre la Via Appia, sortir des murs de Rome et rejoindre les nécropoles.
_ Tu peux me répéter pourquoi j’ai dû abandonner mon bouclier ? Grogna Azenor, mécontente.
_ Les armes sont interdites dans l’enceinte de Rome, seuls les gardes civils peuvent en porter. Je ne t’ai pas déjà dis tout ça ?
_ Peut-être, je t’ai pas écouté tout à l’heure, répliqua-t-elle en croisant les bras. C’est moche Rome.
Il soupira de nouveau, sentant bien qu’elle ne lèverait pas le moindre petit doigt de si tôt. Il avait déjà fallu négocier l’abandon du bouclier pendant près de trois heures. Elle avait seulement accepté à la condition qu’il détache l’umbo en forme de sanglier pour qu’elle le garde sous le bras. Ils ne passaient donc pas inaperçus.
_ Et si nous passions par le forum ? Proposa-t-il en reprenant un peu plus d’entrain. Nous pourrions prendre de quoi nous nourrir pour quelques jours.
_ Ouaaais, supeeer, répondit-elle avec sarcasme.
Aulus lui prit la main, elle ne chercha pas à s’en défaire. Peut-être voulait-elle jouer la grognonne parce qu’elle était esclave.
_ J’ai passé plusieurs mois avec des idiots et ce sale traître de Tigris, tout ça pour visiter des tombes et faire le marché, ajouta-t-elle.
_ Certes, le temps a été long.
Il décida de jouer le positif jusqu’au bout. Après tout, il se promenait sur la Via Appia, parmi les cyprès, les champs et les odeurs de miel, sous un soleil rayonnant, main dans la main avec une superbe blonde aux yeux de déesse. Il n’était pas vraiment à plaindre. Même s’il avait failli ne pas quitter l’armée. César avait traversé le Rubicon*, chose impensable habituellement, le Sénat avait pris la fuite, Rome appartenait à César, la paix était revenue, ou du moins ponctuellement. Il en avait profité pour quitter définitivement son poste de centurion primipile. A présent, il devait reprendre l’affaire de son père, abandonnée depuis sa mort.
_ Tu verras, on fait souvent appel aux menuisiers, on aura vite du travail.
_ « On » ?
_ Tu me donneras un coup de main.
_ Il est hors de question que je travaille à ta place.
_ Ne t’en fais pas, je ne te donnerai rien de difficile à faire, s’amusa-t-il.
_ Ce n’est pas parce que je n’en suis pas capable hein !
_ Non je sais bien.
_ C’est parce que je suis une princesse ! Pas une esclave !
_ Oui, je le sais aussi.
Son sourire redoubla. Elle tenait toujours sa main et il n’avait pas besoin de la traîner. Alors il s’arrêta sur le rebord de la voie et se pencha pour cueillir un coquelicot.
_ Je suis d’un rang supérieur au tien en vérité, réfléchissait-elle. Tu as de la chance que nous n’ayons pas d’esclave chez nous, tu le serais peut-être devenu !... Tu fais quoi là ?
_ Je te donne un ornement digne d’une princesse, répondit-il en piquant la fleur dans ses cheveux ramassés négligemment en un chignon un peu lâche.
Il surprit alors un petit rougissement sur ses joues. Il reprit sa main et la marche. La porte de la cité s’approchait. Les chars restaient à l’entrée, interdits dans les ruelles de Rome depuis longtemps. Mais les piétons affluaient de toute part.
_ Moi j’ai un sanglier en bronze, se vanta-t-elle.
_ Et que vas-tu en faire ?
_ Le clouer au-dessus de la porte.
_ Euh… Non. Non non.
_ Et pourquoi ça ?
_ Parce que je suis romain. Je ne réponds qu’à la louve.
_ Le sanglier est un noble animal, le protecteur de mon clan !
_ Raison de plus !
La bouderie reprit son cours. Aulus la guida à travers la ville bondée, ils suivirent la Via Appia et passèrent sous le Palatin, la colline où s’élevait les plus belles domus de Rome. Le forum fut le point culminant de la cohue. Les maisons étaient vides mais la place débordait de monde. Des marchands de toute la Méditerranée se pressaient là pour faire affaire, les juristes se rendaient à la basilique pour des dizaines de procès, des sénateurs passaient, allongés dans des litières de qualité, les prêtresses vestales marchaient le front haut, la foule s’écartant sur leur passage.
_ Tu vois là-haut ? C’est le temple de Jupiter sur le Capitole !
_ Moi je veux rentrer…
Il la traîna jusqu’à des vendeurs à la sauvette. Ils feraient le marché du Subure un peu plus tard, autant ne pas lui imposer le forum plus longtemps. Il acheta une panière, des légumes, un peu de viande, du pain et de l’huile, puis une petite amphore de vin qu’il tendit à la jeune femme en espérant un peu de soutien. Elle se contenta de soulever sans peine son sanglier.
_ J’ai les mains occupées.
La peste ! Elle ne ferait vraiment rien.
_ Lex !
Aulus fronça les yeux et pivota lentement.
_ C’est bien toi centurion !
Marc Antoine, général de César, nouvellement tribun* de la plèbe, vêtu d’une riche tunique brodée et d’une petite toge pourpre assez voyante, se tenait droit devant lui, entouré de ses esclaves.
_ Ave général, salua mécanique Aulus en tendant le bras.
_ Il n’y a pas de soldat à Rome, je suis tribun Lex.
_ Aulus, reprécisa le centurion.
Le tribun s’amusa de son air gêné et il lui tapota lourdement l’épaule. Antoine était un tactile, il frappait en faisant passer ses claques pour des tapes viriles, même si ce n’était pas méchant.
_ Et donc tu fais ton marché ?
Il était bien décidé à le coller en plus, songea Aulus, un peu désespéré par l’image qu’il renvoyait.
_ Oui je…
_ C’est quoi ça ?
Et voilà, il avait repéré Azenor en moins d’une minute. Ce tombeur invétéré ne perdait jamais de temps. La jeune femme, quant à elle, tiqua en entendant le « ça ».
_ C’est mon esclave.
_ Ton esclave ?
Antoine releva son menton.
_ Aussi belle que ça ? Tu l’as payée une fortune au marché !
Un frisson glacial remonta son échine. Si le tribun se rendait compte du trafic par sa faute, il était perdu.
_ Et bien je…
_ Qui aurait cru que le centurion le plus ennuyeux de l’armée, le plus stoïcien, le plus barbant et le plus juriste de tous, si bien qu’on le surnomme Lex, se munisse d’une beauté telle que toi ! Lança Antoine en s’approchant d’Azenor tout en balançant de rudes tapes sur l’épaule du centurion. J’espère que Tigris a bien pris soin de toi !
_ Je tiens à dire que… Tigris ? S’étonna subitement Aulus.
_ Allons allons primipile, je sais bien que tu l’as faite entrer à Rome en douce, je connais très bien ce petit trafic.
Il se pencha pour parler un peu plus bas.
_ J’ai moi-même fait venir trois celtes avec des seins à damner Caton* !
Antoine enroula son bras sur les frêles épaules de la blonde.
_ Les Gauloises… Tu les allumes et elles brûlent en un instant. Si tu te morfonds avec ton chômeur, tu n’as qu’à passer me voir.
Sur ce, il salua le centurion avec un grand sourire et s’éloigna. Finalement ce n’était pas si étonnant que le tribun ait sauté sur l’occasion de ce trafic. Aulus se mordilla la lèvre et reporta son attention sur la jeune femme. Il eut un léger mouvement de recul en voyant son air menaçant. Elle tenait sa main contre sa poitrine, paume face contre terre.
_ Tu sais c’que c’est ça ?
_ Euh…
Il ne voyait que sa jolie poitrine, mais il doutait bien que ce n’était pas la bonne réponse.
_ Ça, reprit-elle en tentant de conserver son calme. Ça, c’est le niveau du supportable que j’ai pour le moment. Le débordement sera atteint lorsque je ferais ça.
Elle fit voler sa main au-dessus de sa tête.
_ Et lorsque ça va déborder, je te jure que…
_ D’accord d’accord. On va rentrer.
Il lui attrapa la main et se dirigea vers l’Argiletum, une autre voie qui menait au Subure et qui était jonchée de librairies.
_ Tu ne voudrais pas apprendre à lire le latin ? Proposa-t-il.
En guise de réponse elle positionna sa main au ras de son cou et fit mine de le trancher. Aulus abandonna, il se permit tout de même quelques flâneries devant les belles devantures et les livres qui attendaient des acheteurs. Mais comme il voyait Azenor clairement s’impatienter, il pressa le pas. Les rues du Subure étaient un peu plus étroites que les précédentes, il n’était pas rare qu’un immeuble s’effondre sous le poids des constructions. Les lois avaient beau imposer une hauteur minimum, les travaux illégaux s’enchaînaient et les derniers étages ressemblaient à des fours malodorants que se partageaient les plus pauvres. Aulus avait la chance d’habiter dans les hauteurs du quartier, dans l’un des plus beaux immeubles. Au rez-de-chaussée, s’étalaient les boutiques dont une entièrement fermée, l’ancien atelier de ses parents. Ils passèrent sous un portique et entrèrent dans une cour intérieure pleine de vie avec une fontaine dans un angle. Un escalier extérieur menait au premier étage avec un long balcon qui en faisait le tour, un autre escalier, intérieur, menait aux étages supérieurs.
_ C’est ça un immeuble ? Murmura Azenor, la curiosité piquée.
_ Oui, c’est chez nous, sourit le centurion, un peu ému.
_ Aulus ?
Il pivota, une jeune fille aux longs cheveux noirs le regardait avec un grand sourire.
_ Aulus, c’est bien toi ?
_ On se connaît ?
_ C’est moi ! Livia !
_ Oh ! Livia ! Quand je suis parti tu perdais encore tes dents de laie !
Ils gloussèrent tous les deux. Azenor se contenta d’un grognement. Le Romain finit par se détourner de la jeune fille et grimpa l’escalier extérieur. L’appartement était fermé et poussiéreux. Il commença par ouvrir les volets pour que la lumière entre.
_ C’est ‘ça’ chez toi ? Constata Azenor, un peu découragée.
_ Oui ! Tout est en ordre c’est déjà ça !
Une vaste pièce avec une table et deux bancs, des meubles de rangement et l’autel des dieux Lares*, au fond un grand lit séparé par un rideau entrouvert, dans le coin opposé, une cuisine. Aulus commença par dépoussiérer l’autel, il posa les petites statuettes en terre cuite de ses ancêtres sur la planche clouée sur le mur et passa sa main sur la peinture qui la surplombait.
_ Tu fais quoi ? J’ai faim, réclama Azenor.
Aulus prit l’amphore et versa un peu de vin dans une coupelle. Il posa quelques fruits à côté et se recueillit. Azenor l’observa en silence. Elle devrait peut-être avoir un autel elle aussi, dédié à la déesse Mère, celle qu’elle avait toujours priée. Elle regarda son sanglier et se dit qu’il symbolisait l’âme de son père et de son clan. Elle le posa sur la planche, près des statuettes.
Elle ne prononça pas un mot tout le long du déjeuner. Aulus ne fit aucun commentaire sur le sanglier. Au contraire, il ne souhaitait pas non plus la forcer à suivre les coutumes romaines, si elle s’habituait à la vie de l’Urbs*, ce serait déjà une bonne chose.
_ Bon ! Je vais retaper l’atelier, tu n’as qu’à mettre un peu d’ordre. En fin d’après-midi, tu auras une surprise.
Elle se contenta d’un demi-sourire. Aulus sortit de l’appartement. Azenor soupira, qu’allait-elle devenir dans cette immense métropole pleine de Romains ! Elle se sentit subitement si seule qu’elle se contenta de sortir une couverture et de s’allonger sur le lit. En fermant les yeux, elle revit les forêts de son enfance, la calme de la nature qui détonait tant avec ces rues bruyantes… Mais elle était chanceuse, il fallait qu’elle se le répète. Aulus était patient, pas très encombrant et gentil. Sa sœur était pourrie gâtée dans une grande domus du Palatin, son unique famille était donc en sécurité. Azenor se laissa tenter par une sieste et s’endormit.

Aulus repoussa la porte de l’appartement, préoccupé. Comme prévu, le collège était venu demander subtilement une participation pour les funérailles de ses parents, sa bourse s’était encore allégée. Il vaudrait mieux cacher à Azenor le report de sa liberté.
_ C’est moi, annonça-t-il avant de constater avec dépit qu’elle n’avait absolument rien fait.
Azenor se redressa lentement, encore un peu ensommeillée.
_ T’as la surprise ? Demanda-t-elle en baillant aux corneilles.
Aulus devrait peut-être se trouver un esclave travailleur pour l’aider, il ne faudrait plus vraiment compter sur elle. Lorsqu’elle aurait sa liberté, elle rentrerait peut-être chez elle en l’abandonnant purement et simplement.
_ Oui, viens, dit-il simplement en tenant un baluchon dans la main.
Il descendit les marches en silence. Elle le suivit, intriguée. Ils passèrent devant la boutique et Azenor plongea un regard curieux dans l’ouverture laissée pour aérer : l’atelier était propre, un peu mieux organisé. Elle aperçut même une pièce de bois posée sur l’établi, une pièce de bois ronde. Comme un bouclier. Elle tourna la tête, il avait déjà avancé sans l’attendre, elle le rattrapa en courant.
Les rues débordaient moins, le soir tombait lentement, les dîners de la capitale débuteraient et Aulus ne doutait pas que le général Marc Antoine ferait parti des plus fantasques. Lui, de son côté, il avait choisi de faire connaître à la Gauloise l’art des bains à la romaine.
_ L’établissement est mixte, indiqua-t-il en entrant. Prends ce balluchon, c’est une nouvelle robe, tu vas entrer dans les vestiaires, laisser tes vêtements et prendre une serviette.
_ Et je vais me balader nue au milieu de plébéiens dans ton genre ?
_ Nooon, les femmes sont d’un côté, les hommes de l’autre !
_ Mouais, j’en connais qui doivent bien se rincer l’œil.
_ Nooon, répéta Aulus en se massant les tempes. Personne ne passe de l’autre côté. Tu n’as qu’à suivre le chemin, d’abord les bains tièdes, puis chauds, puis tièdes et enfin froids. On mettra des huiles et des parfums à ta disposition, tu t’habilleras et on se rejoindra ici tout à l’heure.
_ ... Et vous ne connaissez même pas le savon ?
Aulus cligna des paupières.
_ A toute à l’heure ?
Il n’attendit pas sa réponse et entra par la gauche, agacé. Il avait besoin de détente. Il n’avait pas de balneatores* comme les patriciens, mais il se contenterait de la location d’un esclave des thermes pour un massage à l’huile. Il laissa ses affaires dans le vestiaire en priant pour que la pétillante princesse ne provoque aucun scandale et se comporte bien. Aulus fit quelques ablutions à l’eau tiède avant d’entrer dans l’étuve de vapeurs chaudes. Les conversations allaient bon train, César, le Sénat en fuite, Cicéron et ses attaques acerbes à l’encontre de Marc Antoine, tout Rome en parlait. L’armée qui circulait en ville changeait les habitudes, le peuple se sentait à la fois en sécurité, et à la fois en otage. Les commentaires débordaient des thermes, les hommes allaient et venaient, rapportaient les idées extérieures, sortaient pour diffuser les nouvelles, une véritable ruche !
Aulus profita de cette profusion pour entrer dans une petite salle ronde avec trois baignoires d’eau tiède, ancrées dans des niches sur les côtés. Deux entrées permettaient de circuler entre l’étuve de vapeurs et une salle de massage abandonnée. Personne ne le dérangerait. Il plongea dans une grosse baignoire de granit et s’allongea paisiblement. Enfin un peu de calme. Il passa sa main sur ses joues, il faudrait qu’il se rase aussi, il passerait par le barbier qui opérait dans les bains.
Des bruits de pas se firent entendre. Il ne bougea pas, complètement détendu. L’inconnu s’installerait dans la deuxième baignoire et, avec un peu de chance, ne lui accorderait pas la parole. Seulement ce fut son eau qui s’agita. Aulus ouvrit brusquement les yeux en se redressant, Azenor enjambait tranquillement le rebord.
_ Mais qu’est-ce que tu fais là ?!
_ J’m’ennuyais, répliqua-t-elle seulement, en s’asseyant à califourchon sur ses jambes, de l’eau au ras des seins.
Eau qui débordait dangereusement de la baignoire.
_ Si quelqu’un te surprend ici, nous sommes fichus !
_ Pourquoi ? Geignit-elle. Vous avez des lupanars* plus importants que vos postes de pompiers.
_ Peut-être, mais porter atteinte aux bonnes mœurs est une honte assurée ! Le crieur le rendrait public en plein forum ! L’ancien centurion primipile amène une blonde dans les bains publics !
_ Une « blonde » ? C’est comme ça que me vois ? Ce n’est pas très reluisant, fit-elle vexée en croisant les bras.
_ D’ailleurs… comment tu es arrivée ici ? Comment tu as traversé les salles remplies d’hommes en passant inaperçue ?
_ J’ai rien traversé, il y a une ouverture dans la salle de massage là, ça donne dans le vestiaire des femmes.
Aulus poussa un soupir. Il s’affaissa, désespéré. Elle fit courir son index sur son torse.
_ Diiiis… On fait l’amouuur ?
_ Non, pas dans les bains publics, grogna-t-il.
_ Alleeez, on fait l’amouuur !
_ Tiens-toi tranquille, conseilla-t-il en la repoussant légèrement.
_ T’es pas drôle, primipile.
_ Domine.
_ Je ne t’appellerai pas domine.
_ Alors laiss…
Cette fois-ci, deux hommes approchaient. Aulus coula immédiatement la jeune femme. Les deux intrus étaient suivis par deux esclaves, ils allaient se faire masser.
_ Tiens ! Centurion !
_ Marcus, Titus, ave ! Répondit Aulus en s’agenouillant pour qu’Azenor remonte à la surface derrière lui.
_ Ave Aulus ! Tu es enfin rentré ? Demanda Marcus.
_ Oui, la retraite.
_ Tu reprends l’atelier de ton père ?
_ Oui, si vous avez besoin de quoique ce soit, passez !
_ Je passerai oui, content que le Subure te récupère !
_ Bon massage les gars, souhaita Aulus comme pour les pousser à disparaître.
_ Oui, les bains sont trop bruyants, confirmèrent les deux amis en entrant dans la petite salle.
Il se tourna vers la Gauloise, elle avait les yeux noirs.
_ Ne me regarde pas comme ça, prévint-il à voix basse. Nous sommes dans de beaux draps à présent !
_ Tu m’as coulée.
_ Je n’avais pas le choix !
_ Si je hurle au viol dans les bains, à mon avis c’est toi qui risques de morfler.
_ Je suis citoyen romain et toi une esclave, c’est toi qui prendras le fouet !
_ On parie ?
Elle inspira lentement et se prépara à s’égosiller. Aulus se jeta sur sa bouche pour l’embrasser, provoquant une vague qui déborda de la baignoire et s’aplatît bruyamment sur le sol. Il attrapa sa nuque et sa taille et la ramena contre lui, elle enroula ses bras autour de son cou, ravie. Tout son corps humide et tiède contre le sien lui tournait la tête, une nouvelle fois. Arriverait-il un jour à la désirer au bon endroit et au bon moment ? Style, dans un lit la nuit, et non pas dans l’endroit le plus inédit qu’il soit pour cela !
Leur baiser s’assagit, laissant leurs mains plus libres des caresses. La peau d’Azenor glissait délicieusement sous ses doigts. Il était si excité que de toute façon, sortir ainsi de la baignoire ne le ferait pas passer inaperçu.
_ Hé dis donc centurion ! Interpella Marcus depuis la salle de massage.
Le couple se figea. Aulus déglutit pour ne pas faire trembler sa voix.
_ Oui ?
_ A ton avis, César, tyran ou sauveur ?
Oh là là, il avait vraiment autre chose en tête ! Azenor aussi puisqu’elle plongea et s’occupa plus intimement de lui. Il se mordit violemment la lèvre.
_ Tyran ! S’exclama-t-il en songeant plus à la princesse pour lui faire subir cela.
_ Tu es toujours aussi catonien mon ami !
Elle remonta à la surface en léchant son torse avant de mordiller son cou. Quel catonien à cet instant ! Il ressemblait plus à un roublard comme Marc Antoine ! Les deux amis reprirent leur discussion de leur côté, Azenor s’imbriqua sur lui tout en douceur. Il la blottit dans ses bras et contint des râles de plaisir en l’embrassant. L’eau débordait en vagues successives, de plus en plus intenses. Au sommet de leur passion, il murmura son prénom, elle posa sa main sur sa bouche pour le bâillonner et planta ses crocs dans son cou pour jouir. Les frissons et les crampes les saisirent quelques instants.
Aulus la serra tendrement dans ses bras. Il était content de l’avoir avec lui. Reprendre sa vie à Rome sans plus aucune attache était plutôt difficile. Un soldat n’avait pas le droit de se marier, à présent il était libre de fonder un foyer. De toute façon il n’avait jamais eu d’esclave. Son père en avait eu deux pour l’aider à l’atelier, il n’avait même plus le souvenir de leur visage.
Azenor plongea d’elle-même, Aulus ouvrit les yeux et vit Marcus et Titus réapparaître. Il s’appuya sur le rebord et se redressant.
_ Dis donc tu en fais des vagues, soupçonna Titus en jetant un œil sur le sol inondé.
_ Hé hééé, les exercices dans l’eau sont les meilleurs, inventa Aulus à toute vitesse.
_ Sûrement un truc de l’armée, indiqua Marcus à son collègue.
_ Oh Lex !
_ Aulus, s’il te plaît.
_ Quoi, ce surnom te va comme un charme, s’amusèrent les deux compères. On se retrouve à la taverne de Pullo ce soir ? Il a reçu de la cervoise gauloise bien fraîche, un délice.
Aulus sentit des ongles lui griffer le bas du dos.
_ D’accord, se dépêcha-t-il de dire.
_ Bien, à plus tard !
_ Vale ! Salua Aulus.
Les deux amis s’effacèrent. Azenor gloussa.
_ Il n’est pas question que tu viennes.
_ Pourquoi ça ? J’adore la cervoise ! Je baigne dedans depuis que je suis gamine !
_ Déjà parce qu’il y a un couvre-feu et que nous ne resterons pas longtemps dans la taverne, ensuite parce que tu es encore une esclave.
_ Mais plus pour longtemps hein ? Hein ?! Insista-t-elle en tapotant son épaule avec son index.
_ Et bien… les funérailles de mes parents ont coûté cher, il va falloir attendre un peu plus que prévu, avoua-t-il.
Elle grimaça avec un air mauvais, puis elle posa sa main sous l’œil.
_ Voilà où il en est mon niveau ! Cracha-t-elle.
_ Oui oui oui, mais maintenant il faut absolument que tu retournes du côté des femmes ! Allez !
Elle grogna, sortit de la baignoire, attrapa la serviette posée dans un coin et repartit comme elle était venue, en passant dans l’ouverture en hauteur de la petite salle de massage. Aulus respira en s’affaissant. Par Jupiter, il l’avait échappé belle !
Il sortit à son tour, s’immergea quelques instants dans la piscine d’eau froide, se fit raser la barbe naissante, puis il sortit de l’établissement et attendit patiemment Azenor. Elle finit par apparaître un peu plus tard. Ses longs cheveux blonds étaient encore un peu humides, deux petites nattes réunies les maintenaient derrière sa nuque. Le péplos* rose lui allait comme un gant, la couleur lui donnait une douceur inhabituelle, si bien que les Romains se retournèrent sur elle tout en marchant.
_ Ici ! Lança-t-il alors qu’elle semblait le guetter.
Elle traversa la rue sur les pierres rectangulaires du passage piéton.
_ Tu es très jolie comme ça.
_ C’est rose, grogna-t-elle.
_ Et alors ? C’est féminin.
_ C’est rose.
_ Soit. La couleur te va bien.
_ C’est rose !
Il acquiesça avec un sourire. Comme il était chanceux, elle était si désirable !
_ Quoi ?
_ Rien, viens, rentrons.
Ils se mirent en route. Quelle impression ferait-il s’il débarquait à la taverne avec son esclave ? Mmmh.
_ A quoi tu penses ? Interrogea-t-elle en constatant le froncement songeur de ses sourcils.
_ A la taverne. Si j’accepte que tu viennes, tu ferais quelque chose pour moi ?
_ Ça dépend.
_ Il faudrait… que tu t’assois sur mes genoux, que tu joues l’esclave folle de moi. Histoire que personne ne s’interroge.
Elle cligna des paupières.
_ Tu veux que je joue ta minette, c’est ça ?
_ … En quelque sorte. Mais tu pourras boire tout ce que tu veux.
_ D’accord.
Il ouvrit des yeux ronds.
_ Vraiment ?
_ Je fais ça pour la cervoise, soupira-t-elle. Qu’est-ce que c’est qu’çaaa ?
Elle s’était arrêtée au carrefour et pointait son doigt. Aulus aperçut le phallus sculpté et cloué au-dessus d’une fontaine.
_ Tu sais très bien c’que c’est, gronda-t-il à voix basse.
_ Je rêve… mais ça sert à quoi ? Pourquoi vous les affichez comme ça ?
_ C’est juste un symbole de fertilité, pas de quoi en faire un scandale.
_ Tu refuses de faire l’amour dans une baignoire mais un phallus aux yeux de tous, là c’est bon !
_ Moins fort, tenta-t-il de tempérer.
_ Tssss.
Ils passèrent devant l’atelier, Aulus le verrouilla. Ils entrèrent dans la cour de l’immeuble, Livia leur fit signe.
_ Aulus ! Tu lui as donné la robe !
Azenor se rembrunit.
_ J’étais sûre que la couleur lui conviendrait, s’enchantait-elle.
_ Oui oui, commenta-t-il rapidement.
_ Je ne l’ai portée qu’une fois, elle semble si neuve sur ton esclave ! J’espère qu’elle ne va pas l’abîmer trop vite avec les divers travaux qu’elle va exécuter. Mais sinon j’ai un vieux péplos qu’elle peut porter pour laver le sol. Et pour la nuit ? Tu veux que je lui trouve quelque chose ?
Aulus tourna un visage pâle vers la blonde, elle avait le visage rougi par la fureur.
_ Je dors nue, lâcha-t-elle d’une voix glaciale avant de faire voler sa main au-dessus de sa tête.
Le débordement.
Aulus déglutit. Il la regarda lui jeter une malédiction silencieuse et monter à l’étage pour claquer la porte de l’appartement.
_ Et bien ? Elle n’est pas encore dressée ? S’interrogea Livia.
_ Euh, merci Livia, mais je n’aurai plus besoin de ton aide, dit-il avait de se précipiter chez lui.
Il entra et referma bien soigneusement derrière lui. Azenor était nue et déchirait la robe, agenouillée près du lit.
_ Que fais-tu ?
Elle releva la tête, à cet instant il crût voir Méduse tant son regard était pétrifiant.
_ Comment as-tu osé me donner la robe d’une plébéienne ?! Déjà portée en plus ?! Je refuse d’être le second choix !
Elle bondit sur ses pieds.
_ Je refuse cette horreur que tu n’as même pas choisie ! Que cette pouilleuse ne m’approche plus c’est clair ?! Ne t’avise pas de la voir ! Idiot ! Crétin !
Elle reprit son souffle, le visage boursoufflé par la colère. Aulus pencha légèrement la tête. Il comprit quelque chose mais en osant à peine y croire.
_ Tu es jalouse ?
Elle se raidit comme une statue.
_ Hein ? M-mais pas du tout ! Jalouse ? Hun !
Elle rougissait à vue d’œil.
_ Livia est déjà mariée.
Elle décroisa les bras.
_ Ah ? Tss, tant mieux pour elle, grommela-t-elle en s’asseyant sur le lit.
_ Tu vas porter quoi maintenant ?
_ Tu n’as qu’à aller m’acheter une robe ! S’exclama-t-elle en reprenant sa rixe. Une robe qui me plaira ! Et que tu auras choisi comme un grand ! Et puis maintenant que ma limite du supportable a été atteinte il faut que je te donne une claque !
Elle s’élança sur lui en trois enjambées et leva la main avec une intention clairement menaçante. Finalement il ne dirait pas adieux à ses réflexes de soldat avant un moment. Il attrapa son poignet, immobilisa le second qui s’élevait déjà, et les emprisonna tous les deux dans le dos de la jeune femme. Elle se débattit jusqu’à ce qu’il pose ses lèvres sur les siennes. Son baiser l’apaisa. Il glissa ses mains au creux de ses reins et il la souleva d’un mouvement. Elle enflamma un peu plus le baiser en empoignant ses cheveux entre ses doigts. Il se dirigea lentement vers le lit.
_ Et la taverne ? Demanda-t-elle subitement.
_ Plus tard, grogna-t-il en tombant sur le lit avec son délicieux fardeau.



Fin


Via Appia (la "voie appienne" est la route du sud-est de Rome, bordée de monuments funéraires)
columbarium (édifice funéraire composé de niches dans lesquelles on déposait l'urne contenant les cendres et autres restes des défunts)
collège (sorte d'association par corps de métier voire par quartier, formée par des citoyens romains et qui peut financer des tombeaux communs par exemple)
Rubicon (fleuve représentant la frontière symbolique de la cité de Rome, il était interdit de le franchir avec des armes et donc une armée)
tribun de la plèbe (représentant de la plèbe au Sénat composé uniquement de patriciens, cette fonction était sacrée, personne ne pouvait lever la main sur un tribun)
Caton le jeune (homme politique romain connu pour son austérité et sa sévérité, il s'est opposé à César et Marc Antoine pour le coup d'Etat dont il est question dans la fic!)
les dieux Lares (dieux protecteurs du foyer et représentants des esprits des ancêtres)
l'Urbs (ce terme était employé par les Romains pour parler de la cité de Rome en elle-même, car le mot "Rome" représente également le territoire et l'Empire)
balneatores (esclaves spécialisés servant leur maître dans les thermes pour les massages etc.)
lupanars (bordels de Rome, de "lupa" louve, car les prostituées hurlaient comme une louve aux portes de la Cité et notamment près des cimetières)
péplos (robe romaine attachée par des fibules sur les épaules)


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MessageSujet: Re: A la limite du supportable (challenge 30 baisers)   A la limite du supportable (challenge 30 baisers) Icon_minitimeDim 26 Sep 2010 - 13:04

OMG mais quelle peste celle lààààààà. Incroyable, je sais pas si tu as déjà fait pire.
Heureusement elle réalise qu'elle n'est pas si mal lotie que ça avec un mec quand même hyper patient. Lui aussi aurait pu en être au stade du débordement et pas qu'une fois.
Jolies descriptions au début, j'adore ! Je me rend compte quand même que toute cette période historique, j'y connais rien !
Tout le passage du bain, merveilleurx PTDR ! Je m'attendais pas à ce qu'elle ose venir chez les hommes juste histoire de calmer ses hormones.
Sont pas sortis de l'auberge tous les deux !

Très sympa comme suite !
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MessageSujet: Re: A la limite du supportable (challenge 30 baisers)   A la limite du supportable (challenge 30 baisers) Icon_minitimeDim 26 Sep 2010 - 16:35

Tu es en train de faire revivre des souvenirs incroyables dans ma tête. Ma passion pour le latin, qui s'était tue dernièrement à cause de mes études est en train de reprendre le dessus ^^ Dingue quoi! Mon chou! Merci!

Et puis, quelle fic ^^ Déjà la via appia et j'étais déjà dans l'ambiance. Oui, ce sont les premiers mots, et quoi? Razz Puis les bains et ce pauvre Marc Antoine (quand on pense qu'il va finir dans les bras de Cléop' c'est hilarant ^^)

Et Livia, elle me faisait penser à lana... comme quoi ^^ Très bien réalisé.

Et débordement, très bien inséré. en plus avec l'idée des bains qui débordent mouhahahahaha J'adore!

Miciiiiiii
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MessageSujet: Re: A la limite du supportable (challenge 30 baisers)   A la limite du supportable (challenge 30 baisers) Icon_minitime

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